Conseil d’arrondissement – Mai 2024
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Séance du 15 mai 2024

Vœux déposés par les élu·es du groupe les Écologistes :

01 – Vœu relatif à la réforme dite du « choc des savoirs » et aux suppressions de postes dans les écoles et collèges parisiens [adopté]

Considérant que l’école publique est notre bien commun dans la construction d’une culture de haut niveau pour toutes et tous, clé de voûte d’une émancipation individuelle et collective et de l’égalité réelle et répondant aux défis sociétaux et économiques d’avenir ;

Considérant qu’elle joue un rôle majeur dans la défense des valeurs de la République et pour faire de nos enfants des citoyennes et des citoyens libres et éclairés ;

Considérant que l’importance est de maintenir un système éducatif public permettant à tous les élèves l’accès à la réussite éducative ;

Considérant qu’à Paris, la rentrée 2024 verra la fermeture de 137 classes et 58 divisions dans les collèges, après une rentrée 2023 déjà marquée par une saignée sans précédent ;

Considérant que la menace de fermeture d’une classe dans 9 écoles dans le 11e arrondissement : écoles maternelles Bullourde, Cité Souzy, Cité Voltaire et écoles élémentaires Keller, 100 République, Servan, Saint-Bernard, 77 Belleville et EEA Saint-Sébastien ;

Considérant que l’argument principal avancé par le gouvernement lors de la Loi de Finances 2024 pour justifier la suppression de 2440 postes (1709 dans le premier degré et 484 dans le 2nd degré) est la baisse démographique, alors que le décret du 21 février 2024 rend public la réduction du budget de l’Éducation Nationale de 691 millions supplémentaires, sans que le nombre d’élèves ait baissé en 4 mois, confirmant ainsi que les réductions de moyens sont avant tout guidées par la volonté de contracter à tout prix les dépenses publiques ;

Considérant que le gouvernement de Gabriel Attal a pris ne série de mesures destinées à revoir l’organisation des apprentissages des élèves à l’entrée au collège, réforme intitulée pompeusement « choc des savoirs » ;

Considérant que l’évocation d’un « choc » témoigne d’une conception assez préoccupante de la réforme d’une politique publique, où l’injonction, soigneusement mise en scène, devrait remplacer le dialogue et la concertation, vus désormais comme une perte de temps ;

Considérant qu’en lieu et place d’un « choc des savoirs », c’est plutôt un « choc de défiance » vis-à-vis des enseignantes et enseignants auquel nous assistons ;

Considérant que cette réforme verra notamment la mise en place d’une organisation différenciée des enseignements en français et mathématiques selon les niveaux imposant de fait un système de tri des élèves lors de leur entrée au collège ;

Considérant que ce « tri » des élèves est stigmatisant pour les enfants qui seront assignés dans le groupe le plus faible et inefficace, toutes les études démontrant au contraire que la mixité est un facteur qui favorise la réussite de tous les élèves, qui ne pénalise pas les bons, et aide ceux qui sont plus en difficulté ;

Considérant que ceux qui ont le plus de difficultés à l’entrée en 6e sont le plus souvent ceux qui viennent de milieux sociaux les plus modestes et que cette réforme constituera donc un abandon de la mixité sociale, à l’opposé de tous les principes républicains ;

Considérant que la recherche en didactique a depuis longtemps convergé sur l’inutilité des groupes de niveaux, qui se révèlent soit particulièrement nocifs pour les élèves en difficulté, soit neutres, en fonction des moyens qui sont alloués pour leur mise en place ;

Considérant que la mise en place des groupes de niveaux va se traduire à Paris par la suppression d’une heure de cours pour tous les élèves, la suppression de très nombreux demi-groupes en langues, en sciences et technologie, mais aussi la suppression de dispositifs pédagogiques existants pourtant utiles ;

Considérant que ce projet de groupes de niveaux annoncerait la fin d’une école républicaine unique pour tou·tes les élèves ;

Considérant que c’est surtout le nombre d’élèves par classe qui influe significativement sur la réussite des élèves ;

Considérant que cette réforme fait peser un risque sur l’inclusivité à l’école ;

Considérant que cette réforme prévoit également un passage en seconde conditionné à l’obtention du brevet, assorti de la création de « classes préparatoires en seconde » dont on ne sait encore comment elles seront organisées et financées ;

Considérant que la volonté annoncée du gouvernement de voir baisser les résultats au brevet des collèges, au moment même où celui-ci deviendrait la condition des poursuites d’études, sans aucune réflexion sur les conséquences ;

Considérant que la volonté d’uniformisation des enseignements et la standardisation des évaluations font peser une grande crainte sur la liberté pédagogique des enseignants et viendront tuer toute volonté des établissements de porter des projets novateurs et adaptés à leur situation ;

Considérant qu’à Paris, comme dans de nombreuses communes partout en France, les organisations syndicales et les associations de parents d’élèves se mobilisent chaque année en faveur de la qualité de l’école publique, rappelant que les accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH) doivent être en nombre suffisant et bénéficier d’un salaire décent, et  que la stabilité des équipes – notamment en éducation prioritaire – garantit des projets pédagogiques ambitieux, rappelant que la présence d’adultes formés et aux conditions de travail améliorées réduit la violence et améliore la réussite des élèves ;

Considérant qu’il existe une opposition affirmée des professionnels de l’Éducation nationale, des organisations syndicales et des représentants de parents d’élèves contre cette réforme délétère qui s’est exprimée notamment lors des opérations « collèges désert », du vote contre les dotations horaires globales en conseil d’administration des collèges, et lors de la manifestation parisienne unitaire du samedi 4 mai ;

Considérant que, présent·es aux côtés des parents et de la communauté éducative dans les conseils d’écoles, les conseils d’administration de collèges et lycées, dans les mobilisations, les élu·es de la majorité partagent leur ambition en faveur de l’école publique et sont dans l’incapacité de leur répondre sur les moyens alloués à l’école privée à Paris ;

Considérant qu’en effet, si le nombre d’enfants scolarisés à Paris diminue depuis 3 ans, la part des élèves scolarisés dans l’enseignement privé est stable ;

Considérant que, selon les projections, le choix de faire porter au public seul les suppressions de postes conduirait à une majorité d’élèves de 6e scolarisés dans le privé à Paris d’ici 8 ans ;

Considérant que l’enseignement privé bénéficie de conditions d’accueil particulièrement favorables, financées à près de 74% par la puissance publique, tout en s’affranchissant des règles communes, de l’accueil de l’ensemble des élèves sans distinction ;

Considérant qu’il serait incompréhensible que l’enseignement public soit plus durement frappé par les suppressions de moyens que l’enseignement privé ;

Considérant que les sénateurs du groupe socialiste, écologiste et républicain au Sénat ont déposé une proposition de loi visant à empêcher les créations de classes dans les établissements privés sous contrat dans les zones géographiques où des fermetures de classes dans les établissements publics ont été effectuées ;

Considérant que l’enseignement privé accueille près de 31% des élèves de la maternelle au lycée à Paris ;

Considérant que la commission de concertation académique de l’enseignement privé de Paris a révélé que sur les 353 suppressions de postes sur toute l’académie de Paris, l’enseignement privé en subit 50 contre 303 dans le public, soit 15% des suppressions de postes ;

Considérant que les projections des directeurs et directrices d’école aboutissent dans certains cas à 29 élèves dans certaines classes en REP, mais aussi à des classes à 29 ou 30 élèves en primaire mais aussi en maternelle, et dans de très nombreux cas à des classes au-delà des 25 élèves pourtant affichés comme une limite supérieure par le ministère ;

Considérant qu’une nouvelle instance de l’académie en juin doit permettre de réviser les mesures de suppressions de postes ;  Que nous soutenons l’ensemble de la communauté éducative en faveur d’une école publique juste pour tous et exigeante pour chacun ;

Sur proposition de Monsieur François VAUGLIN, Maire du 11e arrondissement, et des élu·es des groupes Paris 11 en Commun, Communiste et Citoyen, et Écologiste du 11e, le Conseil du 11e arrondissement émet le vœu :

  • Que le gouvernement renonce à cette réforme dite du « choc des savoirs » et engage un dialogue avec toute la communauté éducative et les collectivités afin d’œuvrer à un projet commun inclusif et ambitieux pour l’école publique de demain ;
  • Que le Ministère de l’Éducation nationale annule en juin toute suppression de poste, afin de permettre la diminution du nombre moyen d’élèves par classe, tant dans le primaire que dans le secondaire ;
  • Que le Ministère de l’Éducation nationale ouvre les postes nécessaires pour développer des brigades de remplacements, pour développer les pédagogies différenciées à même de faire réussir tous les élèves dans des classes hétérogènes, et notamment les élèves en situation de handicap ;
  • Que le Rectorat de Paris communique le nombre de postes supprimés à Paris dans l’enseignement privé sous contrat, primaire comme secondaire, pour les années 2021, 2022, 2023 et 2024 ;
  • Que le Ministère de l’Éducation nationale prévoie la fermeture de 50 classes dans l’enseignement privé à Paris afin de permettre l’ouverture de 50 classes dans le public en transférant les personnels enseignants ;
  • Que l’Etat engage une politique volontariste afin de renforcer l’attractivité des métiers de l’enseignement à travers une amélioration de la rémunération et des conditions de travail des enseignant·es, et revalorise en particulier le métier d’AESH par une augmentation des salaires et une amélioration des conditions de travail.

02 – Vœu relatif à la mise à l’abri pérenne des jeunes de la Maison des Métallos et des jeunes en recours de minorité en situation de rue. [adopté]

Considérant l’occupation de la Maison des Métallos, par environs 80 jeunes exilé·es depuis le 6 avril 2024 ;

Considérant qu’il s’agit de la 7e occupation d’un bâtiment municipal depuis septembre dernier faute de mise à l’abri et de prise en charge de ces jeunes, la dernière en date étant le centre culturel le Centquatre, situé dans le XIXe arrondissement ;

Considérant que ces occupations font suite à plusieurs démantèlements de campement de la part de la Préfecture de Police, sans solution de mise à l’abri, en témoignent par exemple les démantèlements réguliers des campements situés sur les berges de la Seine ;

Considérant que le système des sas proposés en région par la Préfecture ne permet pas un suivi approprié des jeunes et parfois même pas un hébergement ;

Considérant que pour la plupart les jeunes évacué·es sont en recours de minorité et ont donc refusé de partir dans les sas pour ne pas perdre leur recours ;

Considérant qu’avait été ciblée la réquisition du Lycée Brassaï, inoccupé, dans le XVe arrondissement pour mettre à l’abri ces jeunes mais que la Région Île-de-France a saisi la Préfecture de Police pour s’y opposer ;

Considérant qu’à l’approche des Jeux Olympiques et Paralympiques, ces démantèlements sont de plus en plus nombreux pour faire de Paris une vitrine touristique ;

Considérant la situation d’extrême précarité de ces jeunes dépourvus de toute solution d’hébergement ou de mise à l’abri, même temporaire ;

Considérant qu’en même temps ces jeunes ne bénéficient pas de leur droit à l’éducation garanti par la convention internationale des droits de l’enfant ;

Considérant la situation kafkaïenne dans laquelle ils se trouvent le temps de leur recours de minorité devant le juge des enfants, ne leur permettant pas une prise en charge et une mise à l’abri ;

Considérant qu’en cas de doute sur la minorité, celle-ci doit profiter à l’intéressé·e qui se déclare comme tel·le, principe rappelé à maintes reprises par le Défenseur des droits, que ce soit au titre de son rapport sur les droits des étrangers en France de mai 2016 et du rapport sur les MNA de janvier 2022 ;

Considérant que la situation des jeunes en recours est connue depuis longtemps sans que les institutions ne proposent d’issue sérieuse et tenant compte de la protection de l’enfance ;

Considérant aussi l’objet initial de la Maison des Métallos, établissement culturel accueillant des arts visuels et du spectacle et qu’elle ne saurait constituer une solution pérenne de mise à l’abri de ces jeunes ;

Considérant la lassitude voire la détresse psychologique des personnels de la Maison des Métallos, non formés et non accompagnés pour accueillir ces jeunes, accueil si temporaire soit-il ;

Considérant que la Maison des Métallos n’est pas adaptée pour accueillir ces jeunes, a fortiori lorsque de plus en plus d’entre eux se rendent là-bas tentant de trouver une solution.

Sur proposition des élu·es écologistes, le Conseil du 11e arrondissement émet le vœu que la Ville de Paris :

  • Mette à l’abri les jeunes de la Maison des Métallos, dans un lieu adapté à leurs besoins, assorti d’un accompagnement sanitaire, scolaire ou visant une formation professionnelle, et social ;
  • Continue et amplifie son action vis-à-vis de l’État pour qu’il prenne en charge les coûts qui lui incombe ;
  • Reconnaisse la présomption de minorité des jeunes en recours, incluant une péréquation financière de la part de l’État ;
  • Accompagne le personnel de la Maison des Métallos en attendant que l’établissement reprenne son activité initiale.